Incipit de Ce que je sais de Vera candida



Ce que je sais de Vera Candida :

Lien entre le titre du chapitre : Le retour de la femme Jaguar et le personnage éponyme évoqué dans le titre du roman Ce que je sais de Vera candida : la femme jaguar est-elle Vera ? Cest confirmé dès le premier paragraphe de l’incipit : ligne 2 : Vera candida abandonne tout pour retourner à Vatapuna.

Originalté de l’incipit : commencer par un retour et non un départ. En revanche topos de l’arrivée d’un personnage dans un lieu inconnu du lecteur, mais connu du personnage : retrouvailles avec un lieu quitté : thème des traces du passé, de l’écoulement du temps, de la mémoire, peut-être roman fondé sur un retour en arrière qui reviendra sur les raisons pour lesquelles Vera était partie de Vatapuna.

Narration à la 3ème personne donc narrateur externe mais le point de vue adopté est très rapidement le point de vue interne du personnage : verbes de pensée et de perception qui l’annonce : elle sait(l4), respirer l’odeur (l5), elle se voit (l9), goûtant à l’avance la lenteur du temps (17)

Récit au présent qui rend le texte vivant pour le lecteur qui vit avec le personnage.

Intensité dramatique car dès la première phrase l’on apprend que le destin du personnage est funeste : « elle va mourir dans six mois », la question du temps s’impose d’emblée. Impératif du retour à l’origine : il lui faut(l4) 

Lieux Vatapuna  au nom exotique probablement fictif caractérisé par une atmosphère particulière (l9)  saturée de sensations qui s’ouvrent à partir d’une respiration « respirer l6:  petite cabane au bord de la mer ( le mot « cabane » connote une situation matérielle précaire, une certaine pauvreté), tabouret sur lequel s’assoir : attitude de repos et de rêverie face à la mer, odeur puissante des jacarandas ( fleurs rouges des climats tropicaux)) et de l’iode longuement décrite : intime, insistance sur la vitalité de l’odeur 2 fois l’adjectif « vivante « ,avec le système consécutif et intensif : si vivante…qu’on en sent déjà poindre la fin » qui forme du coup un paradoxe dans lequel vie et mort sont mêlées, renforcé encore par les adjectifs « pourrissante et douce » qui font penser à l’odeur des cadavres, des odeurs de chair.

Le personnage de Vera est dans un état de rêverie éveillée qui la rapproche par le souvenir de sa destination. Elle « somnole » dans un « minibus » sur le trajet entre le « port de Nuatu » et vatapuna.( 3ème paragraphe)
Après les sensations olfactives et les images, c’est le souvenir du toucher qui est sollicité, souvenir de contacts précis : « cheville sur le bord d’une caisse », « mains croisées sur le ventre » : attitude qui évoque la villégiature mais aussi la position des morts, idem pour « le dos si étroitement collé aux planches qu’il en épousera la moindre écharde, le moindre nœud, le plus infime des poinçons des termites : acuité de la perception : reprise ternaire l »a moindre écharde, le moindre nœud, le plus infime des poinçons des termites géantes » avec gradation descendante, mais aussi retour à la nature d’un corps qui se fond dans le bois qui le blesse ( écharde, poinçon) confronté à l’action de termites géantes, comme un cadavre dans un cercueil ( caisse) de « planches ». Ambivalence à nouveau qui mêle vie et mort.

Toutes les attitudes et les perceptions dont rêve le personnage semble accordée avec la perspective d’une mort prochaine.

Autre plaisir promis : cf « goûtant à l’avance » la perception d’un temps au ralenti. Sans doute pour lutter contre l’angoisse de la finitude : retrouver la temporalité de l’origine : « le temps tel qu’il passe à Vatapuna. Donc pas seulement retrouvailles avec un lieu mais avec un écoulement particulier du temps, une qualité particulière du temps. Image de l’horloge que Vera veut « récupérer » : s’agit-il d’un objet précis ou d’une métaphore ? cf poème de Baudelaire L’horloge, mais détourné

L'horloge
Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit : " Souviens-toi !
Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d'effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible,

Le plaisir vaporeux fuira vers l'horizon
Ainsi qu'une sylphide au fond de la coulisse ;
Chaque instant te dévore un morceau du délice
A chaque homme accordé pour toute sa saison.

Trois mille six cents fois par heure, la Seconde
Chuchote : Souviens-toi ! - Rapide, avec sa voix
D'insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois,
Et j'ai pompé ta vie avec ma trompe immonde !

Remember ! Souviens-toi, prodigue ! Esto memor !
(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)
Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues
Qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or !

Souviens-toi que le Temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup ! c'est la loi.
Le jour décroît ; la nuit augmente, souviens-toi !
Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide.

Tantôt sonnera l'heure où le divin Hasard,
Où l'auguste Vertu, ton épouse encor vierge,
Où le repentir même (oh ! la dernière auberge !),
Où tout te dira : Meurs, vieux lâche ! il est trop tard ! "

Personnification de l’horloge , elle accomplit ou pas des actions humaines, elle s’apparente à un magicien malveillant ou à un scientifique juste et mesuré: v mentir,  ne pas faire disparaître par enchantement malin les heures pleines, dévorer ( Temps vu comme le dieu Chronos un monstre dévorateur), mais contrairement à l’horloge monstrueuse de Baudelaire qui dévore le temps et accélère la finitude, celle de Vera « égrène avec précision et une impartialité réconfortante les minutes » : elle est objective, scientifique, pas subjective comme les instruments de mesure du temps qui donnent l’impression que le temps passe plus vite car on va mourir. 

Le 3ème paragraphe offre ainsi au lecteur une méditation sur le temps qui normalement est normé par les instruments de sa mesure mais qui pour les êtres humains connaît des variations subjectives, ralentissement ou accélération en fonction de leur états psychiques. Vera espère retrouver à Vatapuna un temps objectif, des « heures pleines », rêve d’échapper à l’angoisse de la finitude, le temps compté qui obligerait à vivre plus intensément en s’abandonnant paradoxalement au décompte objectif du temps scinetifique.Paradoxe car à rebours de la conception romantique du temps.

Plan possible :
1.Un incipit qui fait découvrir le personnage éponyme : Vera candida, la femme jaguar.
2.Un incipit qui nous transporte à Vatapuna, lieu vers le quel le personnage est en route et dont il rêve : un lieu source de sensations très puissantes et paradoxale que le lecteur va partager
3.Un incipit qui invite à une méditation sur le temps et annonce un roman constitué d’un retour en arrière dans l’espace et le temps : qu’est-il arrivé à Vera Candida, Pourquoi est-elle partie de Vatapuna ? que va-t-elle trouvé en revenant ?

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