Premier spectacle à la Comédie de L'Est mardi 7 novembre

N'oubliez pas de prendre vos dispositions pour le premier spectacle que nous allons voir le mardi 7 novembre à 19h à la Comédie de L'Est, route d'Ingersheim, en face de l'Intermarché.Si vous ne rentrez pas chez vous en sortant du lycée, sachez que le hall de La CDE est ouvert et peut vous accueillir dès 17h.
Le spectacle s'intitule Eldorado Terezin et dure 1H 30 mais une rencontre est prévue avec l'équipe de création après la représentation donc vous pouvez vous faire chercher à 21H30.
Comme je n'aurai guère le temps le lundi 6 novembre de vous en parler, lisez ce qui suit pour vous préparer un peu au spectacle.  
Que ceux qui lisent le blog fassent passer le message à ceux qui ne le lisent pas régulièrement.

cinq petites videos sur Arte qui parlent du spectacle 



Dans le royaume d’Analphabète Ier, la police ramasse tous les ossements humains pour créer un fantôme d’État. Les centres de ramassage se remplissent des vieillards du royaume : Honza livre son grand-père famélique pour le bien de la nation, le Juif implore le tyran, et la Mort ne fait plus peur...
 
Interné dans le ghetto de Terezín à l’âge de treize ans, Hanuš Hachenburg écrivit clandestinement On a besoin d’un fantôme, une réécriture bouffonne du nazisme qui se rit des bourreaux et de leurs complices.
À l’origine, le manuscrit parut dans le magazine clandestin Vedem, auquel contribuaient une quarantaine de jeunes rédacteurs.
Cette œuvre étonnante et lucide est éditée pour la toute première fois en français par Rodéo d'âme.
Elle est accompagnée de poèmes du jeune auteur et permet de mieux mesurer la résistance artistique des enfants de Terezín et l’incroyable talent d’un garçon assassiné à Birkenau en juillet 1944.
Claire Audhuy a exhumé cette pièce lors de ses recherches doctorales. Épaulée dès 2013 par le Théâtre de Carouge -Atelier de Genève (TCAG) et son équipe, elle a pu faire vivre ce texte lors  d'ateliers de théâtre concernant une centaine de scolaires.
Soutenue par le TCAG toujours, mais aussipar le DIP, la Fondation Michalski et les
Amis suisses du Dr Korczak,elle a pu en assurer l'édition commentée et la diffusion
via des lectures publiques. Elle en signe à présent la mise en scène dans une
création pour marionnettes intitulée « Eldorado Terezín ».



Note d’intention par Claire Audhuy, la metteuse en scène( Notes dans lesquelles elle explique son projet)

« C'était une partie de théâtre qu'on se jouait.»
Maurice Rossel, au sujet de sa visite du ghetto de Terezínen 1944.

La complexité de Terezín est grande : camp de transit, ghetto miteux, camp de concentration... C'est aussi la vitrine choisie par les nazis pour duper l'opinion internationale. Le ghetto de Terezín devait être représentatif de l'ensemble du système concentrationnaire nazi, devenant même « l'Eldorado » des Juifs d'Europe. Ainsi, après l'avoir « embelli » en vue de la visite d'une délégation internationale, les nazis le firent visiter aux membres du Comité International
de la Croix Rouge et y tournèrent même un film de propagande, d'où son surnom d' « Hollywood des camps de concentration ». On le voit, les épithètes dorés du camp (Eldorado, Hollywood) lui confèrent un statut à part : ce ghetto devait briller et même éblouir ses visiteurs, quitte à les rendre aveugles...

Notre pièce se déroule entre l'hiver 1943 et le printemps 1944. Cet hiver 1943-44,c'est la date-clé à laquelle Hanuš Hachenburg rédigea sa pièce de théâtre clandestine, et à laquelle les nazis choisirent de démarrer leur action d'embellissement du ghetto pour duper leurs invités. Peu de temps après, le printemps 1944, c'est le moment où se déroule la visite officielle de la Croix-Rouge (et cela correspond aussi au séjour prolongé d'Hanuš à Auschwitz).
En octobre 1943, 450 juifs danois sont envoyés à Theresienstadt. Le gouvernement danois demande immédiatement le droit de leur rendre visite.Adolf Eichmann accepte d'organiser la visite d'une délégation internationale, mais pas avant le printemps 1944... Car il lui faut du temps pour transformer l'aspect des lieux et sélectionner les juifs qui feront office de personnes épanouies et bien loties.
Aussitôt, exit les malades et personnes fragiles : 7500 personnes partent à Auschwitz. Quant à tous les autres, ils sont embauchés pour repeindre les façades du ghetto, pour planter des fleurs, construire un terrain de jeu pour les enfants, un théâtre, un pavillon de musique, une piscine, une synagogue, mais  aussi pour rénover le café et la banque, pour ajouter des
pancartes qui fleurent bon la petite ville de province. Et quelques mois plus tard, la Commission arrive et visite les lieux.

Je souhaite rejouer sur scène cette fameuse visite et sa mise en scène singulière.
Pour cela, j'invite les spectateurs à devenir des observateurs, -tout comme à l'époque l'ont été les membres de la Commission Internationale de la Croix-Rouge lors de la visite guidée officielle. Cela me permet de leur faire découvrir la réalité contextuelle dans laquelle Hanuš Hachenburg écrivit sa pièce de théâtre clandestine « On a besoin d'un fantôme ». Cette visite planifiée sert de prologue à la pièce pour marionnettes d'Hanuš que l'on découvrira en seconde partie de spectacle.
 
À l'entrée de la salle, les observateurs du jour sont accueillis par le commandant SS du camp: Karl Rahm. La scène est plongée dansle noir, la salle quant à elle est allumée et le restera jusqu'à la fin de la visite officielle du ghetto (première partie de la pièce). Sur scène, discrètement, s'affaire le Dr Eppstein. Il termine l'installation des derniers préparatifs de la visite, plantant ici de fausses fleurs et ajoutant là un kiosque à musique. Le Dr Eppstein se tient au-dessus d'une maquette qu'on ne perçoit pas bien. À côté de lui, un très grand écran aux décorations désuètes rappelle un cinéma des années 40. Sur l'écran, on lit « Eldorado Terezín », écrit en néons.Karl Rahm salue chaque observateur chaleureusement. Il passe ensuite la parole au Dr Eppstein, qui vient de terminer les derniers détails sur la maquette. L'on
découvre un homme d'une quarantaine d'années, habillé d'un costume et portant
sur la poitrine une étoile jaune. Il s'agit du faux maire de la ville : le Dr Paul Eppstein.
Eppstein est le doyen des Juifs de la ville. En réalité, il n'était qu'un pantin dans
les mains du SS. À l'occasion de la visite officielle, il avait dû soigneusement
apprendre chacun des mots qu'il prononçait et était en permanence suivi par le
commandant du camp lui-même. Ainsi, sur scène, Eppstein est symbolisé par une
marionnette portée aux traits réalistes, d'environ1,70cm. Eppstein, à travers la
voix et le corps du SS Karl Rahm, vante les mérites et vertus de ce camp modèle
« généreusement offert par le Führer » et souhaite la bienvenue aux membres
de cette délégation si spéciale. Bienvenue dans cette fameuse ville dans laquelle « il
fait bon être juif ».


Sous les yeux des observateurs se déroule une visite bien rodée, cadrée par les nazis, au mètre près.
Tout est une question d'angle et de point de vue. De là où ils sont, la vie au ghetto paraît idyllique.
« C'était une farce, mais c'était une farce qui avait été extraordinairement bien préparée. Ils préparaient votre visite depuis déjà des mois, et c'est ce qu'ils appelaient la Verschönerungsaktion, ce qui veut dire : action d'embellissement. Vous avez réellement visité un ghetto Potemkine.»
Toute cette visite s'appuie sur le rapport rendu par la Croix-Rouge au sujet de Terezín au printemps 1944 et sur le film de propagande que les nazis ont tourné en avril 1944. La maquette représente Terezín.
Elle est filmée et l'image est projetée en direct sur le grand écran. Le SS Karl Rahm supervise l'ensemble, tout en manipulant le Dr Eppstein. De temps à autre, le SS intervient aussi sur les petits personnages de la maquette, s'assurant que rien ne lui échappe.
On découvre donc sur grand écran un film tourné en direct, où les rues de la ville sont propres, les maisons coquettes, les parcs verdoyants, et les habitants bien habillés.
Leurs activités sont diversifiées : agriculture, travail en ateliers, match de football, la gare et son train de voyageur en première classe, la piscine, une démonstration de pompiers, des jeux d'enfants, une dégustation de sardines...
Une journée ordinaire dans une ville ordinaire.
Tout cela évoque donc la grande mise en scène nazie dans laquelle les juifs étaient devenus de simples automates. Maurice Rossel,représentant de la Croix-Rouge témoigne de son malaise lors de cette visite en 1944 :

« Maurice Rossel: C'était une visite arrangée, comme une partie de théâtre.

Claude Lanzmann: Vous dites que vous avez eu le sentiment que les gens du ghetto vous fuyaient comme la peste.

Maurice Rossel: Ah, ça, certainement. Les gens me fuyaient.

Claude Lanzmann:
Est-ce que c'était du théâtre que de vous fuir ? Précisément, ils se sentaient incapables de le jouer, le théâtre.

Maurice Rossel: Peut-être, peut-être. Mais personne n'a essayé de dire quelque chose, personne n'a pris sur lui de dire : Eh bien, je vais pousser quand même un cri et je vais quand même dire quelque chose.

Claude Lanzmann: C'était la mort immédiate.

Maurice Rossel: C'était la mort immédiate.»

Claude Lanzmann, Un vivant qui passe, Paris, Gallimard, Folio, pp. 73
-74. Entretien avec Maurice Rossel, délégué de la Croix-Rouge qui visita le ghetto en 1944.




Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Incipit d'une partie de campagne

"Ce fut comme une apparition" extrait de L'Education sentimentale

Le monologue délibératif et le monologue lyrique