Autre exemple d'analyse réussie
Le roman Riz Noir écrit par Anna Moï et publié en 2004, est une
fiction historique basée sur la vie réelle de l’auteure, ayant pour thème
principal la guerre du Viet Nam. En effet, elle raconte à travers deux
personnages fictifs, l’histoire qu’elle a vécue. Le terme « riz noir »
en dit déjà beaucoup sur l’histoire qu’elle va raconter. Assurément, le riz,
cette céréale très répandue en Asie, a un véritable sens connoté : on peut
penser que l’histoire se déroulera dans un pays asiatique. Le mot
« noir », quant à lui, a également une forte connotation : cette
couleur inspire la mort, la terreur, la misère. Le riz noir, est en réalité, le bol de riz
couvert de mouches distribué habituellement aux prisonnières. Le début de ce
roman est très mystérieux. Comment l’auteure crée-t-elle du suspense et
suscite-t-elle l’attention du lecteur ? Dans une première partie, il
s’agira d’expliquer quel type d’incipit Anna Moï utilise puis dans une deuxième
partie il s’agira d’expliquer que son thème principal est la création d'une atmosphère sonore pour faire partager au lecteur les sensations des personnages..
Venue du latin, la formule in medias res signifie « au milieu des choses ». A la première lecture
de l’incipit de Riz Noir, on peut tout de suite remarquer que c’est un
incipit in médias res. L’auteur nous jette dans l’histoire alors qu’elle a déjà
commencé, sans nous expliquer la situation. En effet, le lecteur ne sait presque
rien du contexte de l’histoire, sauf à quel moment de la journée elle se
déroule : « au milieu de la nuit ». Le point de vue
est interne,un narrateur qui appartient à un groupe puisqu'il utilise le "nous" raconte son histoire, c’est-à-dire que le lecteur est convié à s'identifier au personnage principal, cela
nous permet de comprendre que le personnage principal se sent seul et
abandonné : il est le seul réveillé (« les autres dorment »). On ne sait pas qui il/elle est, ni où il/elle se trouve, ni à quelle époque l’histoire
se passe. Il est possible que l’auteure ait choisit ce style d’écriture afin
d’intriguer le lecteur et de créer du suspense. Il est important de souligner
que c’est un roman dramatique, écrit de manière sombre. Le narrateur est dans
une situation désagréable, triste et inquiétante.
Le cadre spatio-temporel est décrit à plusieurs
reprises : Au travers du champ lexical de la nuit
avec « rêve », « dorment », « cette
nuit-là », et grâce au premiers mots de l’incipit, un complément circonstanciel de temps : « Au milieu
de la nuit ». L’auteure utilise l’interrogation pour créer encore plus de
suspense. En effet, la question « Combien d’entre nous l’ont écouté cette
nuit-là, et ensuite, toutes les nuits,
pendant cent nuits, trois cents nuit, ou mille trois cents
nuits » contient une énumération, qui indique qu’elle a perdu la
notion de temps ainsi que le fait que le personnage ne soit pas seul dans le
lieu où il se trouve, les personnes qui l’entourent semble être nombreuses.
Afin de créer le malaise auprès du
lecteur, Anna Moï, dans son incipit, se focalise sur les sons perçus par son
personnage. Le lecteur est ainsi convié à ressentir ce que ressent le
narrateur.
Le sujet principale de l’incipit est la question du
bruit, le personnage principal est à la recherche de la « nature »
du bruit, il finit par l’identifier mais on ne connaitra pas sa nature véritable :
Le personnage n’en fait qu’une description. Dans la plupart des phrases,
l’auteure utilise le champ lexical du bruit. Effectivement on peut trouver
les termes « bruissement », « tumulte »,
« claquements », « inaudible », « oreille »,
« écoute ». Le thème du son est aussi utilisé par le narrateur grâce
à une comparaison : il met en relation le bruit avec « des rafales de
feuilles mortes brassées par le vent ». La narratrice semble perdue car
elle confronte des termes opposés tel que le bruit et le silence. Opposé à
cela, elle décrit les mêmes éléments de manière précise, à plusieurs
reprises, ce qui donne une impression de désorientation. Elle est tout de même
consciente car elle parvient, au début de l’incipit à faire la distinction entre
le rêve et la réalité. Après avoir décrit le bruit, le personnage décrit le son
du vent, qui associé au bruit initial, crée une forme de musique.
Le personnage met en relation le bruit qui l’intrigue
et le bruit de la journée grâce à une autre énumération présente dans
l’incipit : « le tumulte de la journée, le claquement des portes, les
bruits des chaines et les cris ». Le silence semble être apaisant
contrairement à la journée bruyante et horrifiante, il y a un parallèle
important entre le jour et la nuit. Le son de la nuit renvoie à la vie dans une
prison ou du moins à ce qui s’apparente à une prison, dans la mesure où il y a
des chaines ainsi que des cris, des bruits qui semblent être présents à chaque
moment de la journée.
Deux aspects sont
importants dans ce début du roman « Riz Noir » d’Anna Moï. Tout
d’abord le texte commence par un incipit in medias res qui est intriguant,
mystérieux, et qui donne au lecteur envie d’en apprendre d’avantage sur
l’histoire. Le narrateur informe le lecteur de manière brève, sans trop en
dire, ce qui crée du suspense. Elle réussit à séduire le lecteur en
l’intriguant et en le perturbant grâce à une description poussé du bruit perçu
par le personnage. L’incipit a un rôle très important dans ce roman et retient
l’attention du lecteur.
Thibaut
Commentaires
Enregistrer un commentaire